lundi 31 janvier 2011

LA VIE A LA FOURMILIERE (19 mai 2008)

Ma chère amie,

La Fourmilière nom de notre maison choisi pour l’invasion de ces petites bestioles lors de la belle saison, est campée dans la rue principale de notre village peuplé de trois cents âmes, situé dans l’Oise à environ quatre vingt kilomètres de Paris. La vie s’égraine doucement, loin des pollutions atmosphériques, sonores enfin citadines et d’un cadre superficiel.
Lors de la journée festive, organisée à l’occasion de ma confirmation dans notre demeure, tu as visité notre univers campagnard.


Dans le terrain, d’une aire de mille six cents mètres carrés, jouxtant la façade arrière de la propriété, tu as fait la connaissance de notre jolie chienne Judy à la robe dorée, d’où le nom de sa race Golden retriever, rapporteur de gibiers d’eau, et découvert avec étonnement la présence de deux belles brebis pesant environ soixante dix kilogrammes appelées Blanchette et Noiraude pour leur couleur. La seconde était dotée d’une langue toute noire, caractéristique sortant de l’ordinaire. Incontestablement leurs noms manquaient d’originalité mais en 1994, année d’acquisition de nos agnelles, le monde des ovins nous était totalement inconnu. Notre mode d’apprentissage s’avérait complètement autodidacte.
La mission de tondre efficacement et en silence le gazon leur était confiée, elles la remplissaient à merveille. Néanmoins, ces tondeuses écologiques présentaient un inconvénient : elles broutaient aussi les plantes semées avec amour par Jacques, car en ce qui me concerne le jardinage n’est pas du tout ma tasse de thé ! Comme les agriculteurs, nous avions électrifié les endroits sensibles mais le résultat n’atteignait pas le cent pour cent de réussite. Une fois, la tonte du morceau de terre à l’arrière de notre habitation effectuée, les brebis devaient se remettre au travail dans le jardin de devant nettement plus modeste, d’un périmètre de cinq cents mètres carrés. Un roulement s’opérait comparable au système de jachères du monde agricole.
L’hiver, le manque d’herbe se faisant sentir, un apport de graines à base de céréales leur était distribué dans la bergerie, au sol généralement recouvert de paille, aménagée à leur intention. Une pierre à sel et de l’eau complétaient leur alimentation. Tout au long de l’année nous leur réservions les épluchures de fruits et légumes dont elles se montraient friandes. En fait, ces animaux nécessitaient peu de soins. Trois fois par an, nous mélangions dans leur nourriture un vermifuge afin de lutter contre certaines maladies spécifiques aux ovins.
Une autre activité les intéressait de temps à autre, le jeu mais non pas le célèbre « saute-mouton ». Ces animaux exécutaient une série de petits bonds et entraînaient notre fidèle Judy dans leurs interminables courses poursuites. Dès les premiers rayons de soleil, les copines de jeu de Juju, (surnom de Judy), pratiquaient le « bronzing ». Elles s’allongeaient en commençant par agenouiller à terre les pattes antérieures et suivaient les postérieures. Vraiment nous étions contents de les voir heureuses mais chagrinés de ne pouvoir les caresser afin d’établir un réel contact. Elles restaient assez sauvages.
Chaque printemps, un fermier de notre commune pratiquait avec Jacques l’épreuve consistant à attraper les brebis, les coucher dans l’herbe, leur lier les pattes deux par deux afin de les immobiliser dans le but de les soulager de leur laine très fournie.



Une fois tondues, nos sauvageonnes étaient méconnaissables par leur minceur ! Au fil du temps, il nous apparaissait que la superficie du terrain le plus spacieux s’avérait insuffisante pour deux moutons de cette corpulence.
En feuilletant un journal local spécialisé dans les petites annonces, notre œil fut accroché par une vente de boucs nains. Ces caprins occuperaient la même fonction que nos précédentes compagnes à quatre pattes. La surface de notre terrain conviendrait tout à fait à ces animaux de plus petits gabarits.
Après quelques journées de réflexion, nous avions décidé de faire don de Noiraude et Blanchette à des habitants du village, mais la tâche la plus dure restait à faire : attraper nos deux « tondeuses écologiques » afin de les mettre dans la camionnette. Jacques parvint à en saisir une par la laine avec beaucoup de difficulté mais la brebis, pesant plus lourd que lui, l’a entraîné vigoureusement dans le véhicule ouvert à l’arrière. Heureusement, il réussit à reprendre les commandes des opérations. Il restait la deuxième, complètement paniquée par les bêlements de sa « sœur d’adoption » ! Mon mari maîtrisait mieux la situation et le « chargement » s’effectua plus aisément. Les acquéreurs et moi-même assistions au spectacle, passant de l’effroi aux rires. Le choix de remplacer nos deux moutons par des boucs nains était définitif.
Nous sommes donc allés les chercher dans un endroit très éloigné de chez nous, impatients de découvrir, ce que nous pensions être, des petites bêtes à l’allure attendrissante. A notre arrivée, au premier coup d’œil, les animaux ne semblaient pas tout petits comme ceux exposés au salon de l’agriculture à Paris. Après quelques questions auprès de l’éleveur, nous apprenions que leur croissance était terminée ! Nous n’avions aucune raison d’en douter. Leur long pelage gris et noir manquant de douceur nous déçut grandement.
Sur le chemin du retour ils béguetaient sans cesse, stressés par le changement d’environnement. Au bout de plusieurs kilomètres, une odeur pestilentielle se dégageait dans la camionnette en provenance de nos nouveaux compagnons. Nous commencions à avoir un aperçu d’un des inconvénients représentés par ce micro élevage.
Arrivés à la Fourmilière, nos nouveaux « occupants » héritaient d’un nom de bienvenue usité jusqu’à leur disparition dans l’autre monde. Notre choix s’était arrêté sur Caramel et Chocolat sans aucune raison précise. Juju et nous-mêmes allions devoir nous adapter à leur façon de se comporter. Nous étions tout à fait conscients que la cohabitation s’avérerait délicate.
Après quelques mois d’acclimatation, notre chienne comprenait leur fonctionnement et se méfiait de leurs coups de cornes. Quant à nous, ils nous attaquaient brutalement par derrière au risque de nous déstabiliser. La liste des désagréments commençait à s’allonger. Si nos brebis endommageaient les plantes au sol et à cinquante centimètres de hauteur, nos caprins s’attaquaient avidement aussi aux feuilles des arbres et le pauvre jardin perdait, chaque jour un peu plus, son charme obtenu aux prix de nombreux efforts. Nous n’étions pas au bout de nos surprises !


Nos boucs oubliaient de s’arrêter de grandir ! Nous avions été dupés ! Les mois filaient et nous nous sommes résolus à les céder.
Toujours dans ce même hebdomadaire, paraissaient quelques annonces de cessions de moutons nains d’Ouessant. Quelques précisions étaient apportées à leur sujet. Cette race très rustique vivait à l’origine sur cette île bretonne. Leur poids avoisinait les dix sept kilogrammes, rien de comparable avec les précédentes, de plus ils s’avéraient, parait-il, sociables. Enfin, nous allions, assurément, remédier à notre problème de tonte de la pelouse. Une fois encore, le parcours afin de nous rendre chez cet éleveur prenait deux heures et demie.
Arrivés dans la cour de la ferme, le propriétaire des lieux nous conduisit dans la bergerie où se tenaient deux petits béliers noirs couchés dans la paille. Ils manifestèrent en bêlant fortement leur mécontentement d’être dérangés et se levèrent. Nous pouvions les regarder de près.


Leur laine très longue et très noire les faisait ressembler à des animaux préhistoriques. Leur langue était toute noire et leurs cornes s’enroulaient déjà malgré leur jeune âge. Enfin, ces moutons, de très petits gabarits, allaient devenir nos « tondeuses écologiques. »
De retour à la maison, comme à l’accoutumée ces ouessantins recevraient un nom. Cette fois-ci, un sobriquet humoristique les définirait : Zig et Zag. Le temps s’écoulait doucement et notre trio composé de Judy et des deux moutons s’accordait très bien, d’autant plus que notre chienne détenait un net avantage, un poids supérieur d’une bagatelle de trente kilogrammes ! Leur jeu semblable à celui de nos précédentes brebis conviait Juju à prendre part à leurs moments de défoulement. Ces instants de bonheur étaient partagés par toute la famille ! Leur apprivoisement demeurait difficile et les caresser tenait de l’exploit ! Tisser des liens avec eux exigeait de passer plus de temps en leur compagnie et de leur parler. La superficie du terrain convenait tout à fait à leur appétit nettement moins vorace et la pratique de l’alternance des terres après chaque tonte se perpétuait. Les élevages se succédaient mais les besoins de ces nains demeuraient identiques. Contrairement à Blanchette et Noiraude, Zig et Zag étaient vêtus de leur manteau de laine toute l’année mais ils appréciaient quand même de prendre le soleil.
A la Fourmilière, la vie coulait comme un long fleuve tranquille. Les animaux avançaient en âge et nous savions que leur espérance de vie atteignait environ une dizaine d’années pour tous.
Début avril 2006, Judy, âgée de douze ans, commençait à moins s’alimenter. Elle laissait de plus en plus de croquettes dans sa gamelle. Nous pensions à un phénomène de lassitude et décidions de les remplacer par une nourriture plus fraîche. Notre chienne goûta la viande, en consomma une petite quantité et abandonna son écuelle. Le lendemain, elle était prise de vomissements et de convulsions inquiétantes.


Un amaigrissement notable accentuait son état de santé dégradé. Dans ses yeux, nous pouvions lire un appel au secours ! Affolés, nous emmenions notre fidèle compagnon chez le vétérinaire en espérant que son cas ne s’avère pas trop grave. Une analyse de sang était effectuée. Son résultat indiquait une affection au niveau du foie : une hépatite virale ou un cancer. Afin de cibler plus précisément la maladie, une échographie se montrait indispensable. La vétérinaire aidée de son assistante couchaient notre gentille Judy sur le dos et lui rasaient le ventre pour la préparer à l’examen. Durant les manipulations, elle restait immobile dans le but de ne pas gêner leur déroulement. A l’écran, nous pouvions voir malheureusement des taches sombres représentant des métastases. Le diagnostic était confirmé : cancer du foie. L’équipe médicale nous faisait comprendre que la phase finale était déjà atteinte et que par amour pour elle nous devions abréger ses souffrances. La douloureuse décision de l’euthanasie était prise. Après des adieux chaleureux à notre petite Judy, nous la quittions dans les larmes. L’enterrer dans le jardin était au-dessus de nos forces alors la clinique se chargea de son incinération.
De retour à la Fourmilière, la maison nous semblait vide et dans le jardin étaient dispersés des objets lui appartenant comme ses balles de tennis, ses ballons, ses os et d’autres jouets. A l’intérieur, son panier occupait un coin du salon et ses gamelles se trouvaient dans la cuisine. Nous devions nous débarrasser de toutes ses affaires afin d’essayer de ne pas trop penser à elle mais nous allions quand même vivre une période de deuil car elle représentait un membre de la famille à part entière après douze ans de vie commune.


Fin mai 2006, un couple d’amis, résidant dans le village voisin, remarquant notre éternelle tristesse nous offrait un lapereau, âgé de deux mois, pour nous consoler. Ce petit mammifère, albinos par la couleur blanche de son poil, sortait de l’ordinaire par ses yeux bleus. De nouvelles responsabilités nous incombaient, nous occuper de ce gentil rongeur. Quel nom allions-nous lui trouver ? Une appellation courte, de préférence en deux syllabes, et amusante. Les dessins animés restaient une bonne source d’inspiration. Pourquoi pas Daisy ? Nous le tenions ! Nos donateurs n’étaient pas en mesure de déterminer le sexe de ce petit animal encore trop jeune. Nous jugions très judicieux de déclarer le jardin de devant son territoire car il était clos de murs et cette délicate boulle de poils ne pouvait donc pas s’échapper. Chaque jour, elle découvrait un peu plus son domaine. Grâce à Internet, nous avions réalisé un dossier reprenant les aliments toxiques pour ces mammifères. Quotidiennement, nous sélectionnions soigneusement les épluchures des différents fruits et légumes que nous complétions avec une carotte entière. Tous les matins, Daisy recevait sa précieuse nourriture. Très vite, tout comme le chien du célèbre monsieur Pavlov elle fit le lien entre l’ouverture de la porte en début de journée et la distribution de ses gourmandises. Elle arrivait en courant ou nous attendait déjà à côté de sa mangeoire. Très impatiente, lors du réapprovisionnement de son distributeur de nourriture, Daisy ne pouvait s’empêcher de voler quelques gourmandises dans le récipient. Cette petite coquine s’était bien intégrée à son nouvel univers et en connaissait par cœur chaque recoin. Son bien-être ne faisait aucun doute ! Elle s’allongeait au soleil sur le flanc, la tête sur le côté et s’endormait ou s’étendait sur le ventre, les pattes de devant croisées sous son menton, celles de derrière retournées et sombrait dans les bras de Morphée. Lorsque nous la caressions, elle émettait un grognement comparable à celui d’un cochonnet, crachait et griffait comme nos amis félins. Cette lapine, dont nous connaissions enfin le sexe, se laissait câliner au gré de ses envies. Malgré son caractère bien trempé, elle nous amusait beaucoup. A la période des cerises, ce phénomène rognait avec délice les fruits bien rouges et recrachait les noyaux. Quel bonheur de l’observer ! Nous avons oublié de préciser sa compétence dans la tonte très rapide de la pelouse. Elle donnait un sacré « coup de main » à nos deux tondeuses écologiques. Lors du passage de Zig et Zag dans le terrain devant la maison, nous pouvions constater une bonne entente entre nos trois protagonistes. Ils mangeaient l’herbe les uns à côté des autres et assistions parfois à une scène émouvante, Daisy assoupie entre les pattes de l’un ou de l’autre couché. En dehors de ses phases de jeu basé sur la construction de terriers inachevés, elle employait une bonne partie de son temps à faire des longues toilettes minutieuses lui procurant un poil d’une blancheur éclatante !
Le mois de juin était déjà bien entamé quand l’éleveur intervint pour raser nos ouessantins dans le but de faciliter la tâche du vétérinaire. Les attraper fut un exploit. Ils paniquaient car nous les immobilisions au sol avec leurs pattes ligotées deux par deux. Une fois tondus, ces petits animaux avaient perdu leur allure préhistorique. Ils étaient tout maigres et ne semblaient pas se reconnaître.
Trois jours après, à notre retour des courses, Zig bêlait bizarrement et nous n’apercevions pas Zag. Nous étions inquiets, nous parcourûmes le jardin et le découvrîmes éventré à côté de la citerne de gaz. Il était sans vie. Nous devions nous mettre en quête d’une société d’équarrissage car la superficie de notre terrain n’était pas suffisante pour enterrer un mouton. Zig était blessé mais avait résisté aux attaques d’un chien tueur. Il bêlait sans cesse, il était impératif de lui trouver un nouveau compagnon pour le calmer et l’aider dans sa tâche. Dans deux jours, le vétérinaire venait effectuer le prélèvement de sang permettant de certifier la bonne santé du cheptel !
Quelque temps auparavant, nous avions repéré dans un parc animalier la vente de moutons du Cameroun, ressemblant à des biches avec leur toison fauve à l’exception de leur ventre noir, leurs yeux maquillés d’un contour noir, leur museau et leur bouche noirs ressortent dans leur tête fauve, deux petites oreilles passant sous leurs cornes et une grosse fourrure formant leur poitrail dont la spécificité est la perte de leur poil l’été. Voilà le remplaçant idéal de notre regretté Zag ! Nous ignorions si des agneaux, d’environ six mois, étaient disponibles.
Après un entretien téléphonique, nous étions rassurés, le calvaire de notre Zig allait prendre fin d’ici deux jours. Le jour J, au bout d’une centaine de kilomètres, nous atteignions enfin le lieu « de la délivrance ». L’éleveur nous laissa choisir notre futur protégé au sein du troupeau en liberté. La principale difficulté s’avérait de le faire rentrer dans la bergerie afin d’attraper l’animal sélectionné. Il nous délivra les différents papiers concluant une vente dont un certificat vétérinaire attestant le troupeau indemne de brucellose.
Le retour à la maison se déroula sans encombre.


Une fois arrivés à la Fourmilière, nous présentions immédiatement Zag bis, nom de notre nouveau compagnon, à Zig. Ce dernier s’était arrêté de pleurer et courrait après ce jeunot dans l’intention de copuler. Dès que ce pauvre agneau marquait une pause, notre vieux mouton lui léchait très rapidement le haut du dos et tentait de s’accoupler. Le comportement homosexuel est très répandu chez les animaux. Zig se chargea de son apprentissage de la vie à la Fourmilière. Le partage des friandises, épluchures de fruits et légumes, morceaux de pain et rondelles de carottes, jetées dans l’herbe assez tôt le matin suivi de la distribution des graines dans des auges séparées dans la bergerie. Très rapidement, du fait de son poids nettement supérieur, le nouveau copain de jeu devint le chef de bande. Nous pouvions assister à des joutes d’une extrême violence déclenchant des saignements du museau assez impressionnants chez notre senior. Le rapport de force s’était inversé et l’attitude de Zag bis le montrait tous les jours surtout au moment du repas. En dehors de cette heure, ils manifestaient leur joie de vivre en jouant ensemble. Ils courraient l’un derrière l’autre et sautaient de façon personnalisée. Zig effectuait des petits bonds en fonction de sa taille naine tandis que Zag bis réalisait des cabrioles comme un animal de cirque. Ils étaient très drôles ! Lors de leur passage dans le terrain de devant, le petit nouveau fit la connaissance de Daisy en douceur. Il n’exprimait aucune violence à son égard et la reniflait gentiment. Elle restait immobile et semblait apprécier le souffle chaud de Zag bis sur son corps. Une merveilleuse entente était née ! En ce qui concerne les gâteries, le partage s’opérait sans trop de combat ! La tonte du jardinet était effectuée beaucoup plus rapidement avec trois « tondeuses ». De retour dans le terrain de derrière, l’herbe avait poussé et nos deux moutons reprenaient aussitôt le travail. Lors de leurs pauses, ils se couchaient et ruminaient longuement l’herbe précédemment ingérée avant de la digérer. Nous aimions les regarder prendre le soleil, jouer, enfin tout simplement vivre !
Une année s’était écoulée et Zig montrait des signes de faiblesse. Cette situation n’était pas pour nous surprendre car il était âgé de 10 ans. Notre senior ne s’alimentait presque plus et restait toujours couché. Au bout d’une semaine, la vie le quittait et nous étions obligés de faire, de nouveau, appel à l’équarrisseur toujours pour la même raison. Zag bis pleurait la disparition de son petit camarade. Le temps s’égrainait et il ne supportait pas la solitude. Dès notre apparition dans le jardin de derrière, notre compagnon accourait pour être caressé, nous suivait partout comme un petit chien et lors de nos marques d’affection fermait les yeux de plaisir. Pendant ce temps, nous nous étions mis en quête de lui trouver un petit copain de la même race et d’un très jeune âge afin d’éviter trop de problèmes d’adaptation.
Grâce à Internet, nous avions trouvé un parc zoologique, situé à Fort Mardyck à six kilomètres de Dunkerque, faisant don d’un agneau camerounais. Nous étions aux anges ! Après quelques échanges de mails, nous apprenions que le « bébé » serait sevré dans trois mois et nous nous mettions d’accord sur la date du 1er octobre 2007 pour aller le chercher. Nous étions comme des enfants le jour de noël, impatients de le recueillir. Les mois nous paraissaient interminables et Zag bis demeurait toujours inconsolable ! Quinze jours avant le rendez-vous, nous avions réservé une chambre d’hôtel à Dunkerque afin de faire une escapade en Belgique.
Enfin le dimanche 30 septembre arriva, jour du départ. Nous étions tout excités. Notre voyage représentait environ trois cents kilomètres. Le temps était clément et la circulation fluide, des conditions idéales nous permettant d’atteindre la destination à l’heure du déjeuner. Au restaurant, nous avions choisi de déguster une des très nombreuses spécialités typiquement du nord pour réveiller nos papilles, le potjevleesh, assortiment de viandes de veau, lapin et poulet en gelée, agrémenté de ses éternelles frites accompagné d’une bonne bière locale. A la table voisine, une charmante dame entama la conversation et nous conseilla vivement de visiter la ville belge de La Panne, située en bord de mer, à une vingtaine de kilomètres de Dunkerque, très animée le dimanche par l’ouverture de ses magasins. Séduits par cette description, nous avons donc visité cette cité dans le courant de l’après-midi. Jacques en a profité pour se réapprovisionner en cigares, luxe moins dispendieux dans cette charmante contrée. De retour à Dunkerque, nous effectuions une pause à l’hôtel avant de savourer une copieuse moules frites comme dîner servie avec la fameuse boisson régionale !
Après une nuit de sommeil agité, le jour du rendez-vous avait enfin sonné. Nous étions euphoriques et empressés de découvrir notre nouveau protégé. Arrivés au parc zoologique de Fort Mardyck, lieu de la rencontre, le directeur nous emmena tout de suite vers la bergerie où l’agneau était couché entre les pattes de sa mère. Il l’attrapa, nous le présenta rapidement.


Ce petit animal s’appelait Bakari. Notre donateur se dépêcha de le déposer à l’arrière de la fourgonnette dont le sol était recouvert de paille pour rendre « l’habitacle » plus confortable. Le jeune mouton commença immédiatement à appeler sa mère, nous quittâmes le zoo hâtivement sur les conseils de notre interlocuteur.
Le périple ne s’annonçait pas dans d’aussi bonnes conditions qu’à l’aller. La pluie tombait drue. Notre nouveau compagnon à quatre pattes donnait des coups de tête dans la carrosserie dans l’espoir de s’échapper et bêlait à tue tête, déboussolée par la séparation maternelle et sans doute, le bercement du moyen de locomotion s’avérait aussi une primeur. J’essayais de le rassurer en lui parlant mais les kilomètres défilaient et je me sentais impuissante devant sa détresse. Nous nous arrêtâmes sur l’autoroute afin d’acheter du pain dans l’espoir de le calmer mais il refusait de le consommer.
Enfin nous étions arrivés à la Fourmilière et nous occupions en premier lieu de porter Bakari dans le terrain de derrière la maison pour recouvrer la liberté. Il s’arrêta immédiatement de pleurer et Zag bis oublia sa solitude, très intéressé par ce petit copain aux longues pattes, au corps frêle, au petit minois adorable doté d’un regard velouté. Le plus âgé ne cessait de poursuivre le plus jeune afin de lui lécher frénétiquement le dos et cherchait de temps à autre à copuler. Quel drôle d’accueil !
Les jours suivants, nous faisions découvrir à notre petit protégé les friandises composées d’épluchures de fruits, de légumes et de morceaux de pain sec. Il les appréciait. Tous les matins, se déroulait le cérémonial des gâteries et de bonne heure nos deux gourmands réclamaient leur ration. Zag bis se montrait très agressif vis-à-vis de Bakari lors de la distribution de la nourriture Il lui donnait de violents coups de cornes l’assommant. Hiérarchiquement, Il représentait le chef et par conséquent détenait un droit de propriété sur les aliments. En dehors de la pause gourmande, il le suivait partout et le pressait de ses assiduités comme un mâle fait la cour à une femelle.
Les semaines s’envolaient et Zag bis forçait Bakari à se mesurer à lui mais ses cornes ne poussaient pas assez vite et sa tête conservait son minois de « bébé ». L’inégalité était indéniable. Heureusement, le jeu les réunissait, nous pouvions observer des parties de courses effrénées à travers le terrain et des cycles de repos bien mérité. Dès notre apparition dans le jardin, le petit « camerounais » accourrait nous dire bonjour et tendait son cou délicat vers nos mains en quête de caresses. Un échange d’affection s’opérait quotidiennement et plusieurs fois par jour. Nous ne devons pas perdre de vue qu’ils étaient très actifs dans la tonte de l’herbage. Ce petit canaillou apprenait à son camarade à grimper afin de se régaler des feuilles pendues aux branches d’arbres comme les chèvres ! Par malheur, nous ne pouvions les surveiller toute la journée pour les empêcher de dévaster le charme de notre environnement.
Depuis quelques jours, le thermomètre affichait des températures négatives et à la Fourmilière, le jardin avait revêtu son manteau de givre et les toits des maisons avaient blanchi perdant leur jolie couleur orangée des beaux jours. Malgré la distribution de graines à nos deux béliers, Bakari tremblait parfois de froid car sa seule toison de bébé moelleuse et bouclée le protégeait et il ne se mettait pas toujours à l’abri dans la bergerie rendue plus confortable par l’apport de paille. L’hiver précoce s’annonçait rude et long.
Les mois se succédaient. Notre junior ne s’étoffait pas beaucoup et nous ne remarquions pas beaucoup de changements physiques à l’exception de la taille de ses cornes. Depuis quelques jours, son comportement s’était modifié, il n’avait de cesse de se frotter contre nous. Un matin nous nous sommes aperçus du mauvais état de ses parties génitales, rongées et sanguinolentes ! Quelle horreur ! Nous lui avons désinfecté ses plaies malgré ses bêlements de souffrance, espérant obtenir une cicatrisation. Nous entendions ses dents crisser. Malgré la dégradation de sa santé, il puisait dans ses ressources la force de lutter contre la maladie et restait debout ! Le lendemain matin le 3 mars 2008, Bakari était couché, immobile, la tête en arrière et les yeux ouverts. L’heure de son voyage céleste avait sonné pendant la nuit et nous le ressentions comme une délivrance. Son existence avait duré huit petits mois à cause de la brucellose. Une fois encore, l’équarrisseur allait intervenir le lendemain afin d’emporter le corps du « bébé ».
Nous nous posions des questions au sujet de la contagiosité de cette affection. Si Zag bis était contaminé, fallait-il quand même remplacer l’agneau ? Nous ne souhaitions pas subir les contraintes des Services Vétérinaires de l’Oise concernant les moutons, à savoir la prophylaxie ovine. Nous réfléchissions à innover dans des bêtes ne faisant appel à aucune coercition gouvernementale et actives dans la tonte de la verdure.
Les jours suivants, deux animaux seulement partageant notre vie, nous avions instauré un roulement dans la répartition de ces aliments si convoités par chacun de nos compagnons à quatre pattes : un jour sur deux Daisy savourait l’inestimable subsistance. Depuis l’envolée de Bakari vers le paradis des animaux, notre bélier était redevenu affectueux et se laissait caresser longuement la tête, les cornes et sous le cou. Ces cajoleries lui procuraient un plaisir frisant un état hypnotique. Il restait sans bouger, le regard dans le vague. La Fourmilière s’était transformée en un havre de paix. Chacun menait sa petite vie. Tous les soirs vers dix huit heures, notre mâle réalisait des cabrioles sur ses deux pattes postérieures accompagnées de bonds gigantesques et de courses folles à travers le terrain. Au bout d’une demi-heure sa crise d’euphorie se calmait. Quelle originalité !
Nous avions entendu parler d’oies tenant le rôle de tondeuses écologiques et nous poussions notre étude sur Internet. Après la consultation de plusieurs sites, nous connaissions mieux cette catégorie d’animaux et nous décidions d’en accueillir deux aux beaux jours. Nous commencions déjà à nous préoccuper de leur bien-être. Un couple de villageois nous avait cédé un bassin d’un mètre cinquante de diamètre sur trente centimètres de profondeur car elles adorent se baigner. Nous investissions dans une mangeoire à laquelle Zag bis n’aurait pas accès. D’anciennes gamelles à Juju serviraient d’abreuvoirs et nous leur aménagions une petite cabane garnie de paille.
Enfin le lundi 5 mai 2008 était ensoleillé et jour de marché à Gisors.


Nous achetions donc une paire d’oisons femelles âgés de quatre semaines, l’un gris et l’autre blanc afin de les différencier. Arrivés à la Fourmilière, ils ont été baptisés Pépita le gris et Bécassine le blanc et ont découvert leur nouvel environnement au demeurant très accueillant : une assez grande superficie d’herbe bien verte, une mangeoire bien pourvue en graines, des abreuvoirs débordants d’eau fraîche, la piscine et leur abri douillet. Les présentations avec Zag bis ont été faites. Il a reniflé ses nouvelles partenaires de jeu gentiment et leur a donné de violents coups de cornes les faisant voltiger à plusieurs mètres et leur provoquant des douleurs dans la station debout. La séparation s’avère vitale jusqu’à l’âge adulte. Notre compagnon veut garder jalousement le terrain pour lui, c’est son territoire ! Comme un enfant gâté, de colère, il est allé dans la bergerie passer ses nerfs contre les murs à la structure en bois ! Nous observions quotidiennement nos palmipèdes. Ils se montraient maladroits et sautaient dans leurs gamelles d’eau à tour de rôle ! Nous sentions que ces « demoiselles » organisaient doucement leur vie. Elles commençaient à connaître les coins et les recoins de leur surface de jardin. Selon la température, Bécassine et Pépita alternaient entre les zones chauffées par le soleil et les lieux plus ombragés pour se reposer. Le repérage de la nourriture et de la boisson était acquis. Elles trempaient leur petit bec dans leur abreuvoir et toilettaient longuement leur fin duvet tombant progressivement pour laisser place aux plumes. Quelle toilette minutieuse ! En l’espace de deux semaines, les belles plumes ont remplacé le duvet et ces animaux de basse cour se sont drôlement étoffés, ils sont à peine reconnaissables ! Nous les entendons cacarder agréablement lors de notre apparition dans le jardin. Etonnamment, ils se sustentent couchés et occupent une bonne partie de leur temps à lisser leur joli plumage ! Nous espérons les voir glisser sur l’eau très bientôt comme un patineur se déplace sur la glace ! Voila la composition de notre univers animalier nous apportant des joies et des peines. Je souhaite t’avoir fait partager l’espace d’un instant notre agréable vie au sein de notre petite ménagerie.

LE BONHEUR D’UNE CONVERSION PERPETUELLE (13 avril 2010)


En 1992 lors d’une crise dépressive profonde, j’ai perçu une petite voix intérieure me priant de me faire baptiser. Elevée par des parents adoptifs, d’un anticléricalisme farouche, ils ne m’avaient pas fait passer par les eaux du baptême et ne m’avaient dispensé aucune éducation religieuse. Je me rendis à la première église Saint-Vincent de Paul de mon lieu de résidence dans les Hauts de Seine pour m’enquérir s’il était envisageable de recevoir ce sacrement adulte. La réponse fut affirmative.
J’obtins le 10 juillet 1992 un premier rendez-vous avec la responsable du catéchuménat. Lors de ma rencontre, elle me posa quelques questions afin d’être plus éclairée sur ma personnalité pour sélectionner mon guide spirituel. (Cette idée de baptême m’avait déjà traversée l’esprit lors de mon adolescence car je fréquentais une fille dont la mère enseignait le catéchisme et ma grand-mère m’avait parlée de Jésus-Christ dans mon enfance).
Le 6 octobre 1992, je faisais la connaissance de Jacqueline, directrice d’école d’infirmières de son état, qui allait m’accompagner dans mon parcours catéchuménal. Elle était impressionnante par sa taille et il se dégageait de son personnage une certaine rigidité. J’étais très intimidée et complexée par mon ignorance sur le monde de la religion. Je me sentais si petite dans cette nouvelle relation.
Un planning de rencontres fut déterminé, nous nous étions fixés le rythme d’une séance hebdomadaire.
Très vite, mon air un peu coincé s’envola et nous nous découvrions peu à peu des points communs. Notre binôme fonctionnait bien.
La préparation au baptême se déroulait sur deux ans au minimum. Chaque semaine, j’étais de plus en plus assoiffée de connaissances et me documentais sur tout ce qui me passait par la tête. Chaque partage me mettait en joie et je vivais sur un petit nuage, la tête dans les étoiles. La formation s’accomplissait en cinq étapes avant le jour de la réalisation de mon vœu le plus cher, d’entrer dans la grande famille des chrétiens.
Le 15 novembre 1992, je me sentais prête pour franchir la première étape de mon parcours : faire mon entrée en église. Ce premier stade était un grand moment dans mon cœur de femme en recherche. A cette occasion, mon accompagnatrice m’offrait une croix lors de la célébration, symbole porteur de signification.
Le temps s’écoulait et la lecture de la vie des saints et saintes approfondissait ma foi. Je commençais à entrevoir l’Amour de Dieu et à mieux appréhender le sens de la conversion.
Mi-avril 1993, je ressens le besoin impérieux d’effectuer une retraite spirituelle. Celle-ci se déroulera du 14 au 17 avril au Monastère de la Visitation à Paris dans le quatorzième arrondissement afin de me purifier, de rentrer plus en communion avec Dieu, de m’imprégner de la sérénité intérieure des religieuses qui les fait rayonner malgré leur âge avancé. Elles qui ne désertent jamais les chemins intérieurs ! Je ressors de cette période de recollection complètement ressourcée et transfigurée. Ce séjour chez les sœurs me confortait dans ma foi.
Le 30 janvier 1994, la seconde étape consiste en la remise du « Notre Père ». Une prière baignée d’humilité et riche de sens si une analyse en est effectuée. J’ai réalisé un pas de plus sur le chemin.
Afin d’étancher mon inextinguible soif de connaissance, je participe à un groupe biblique à un rythme d’une séance hebdomadaire. L’interprétation de textes religieux a souligné la faculté de Dieu à s’adapter et se conformer humblement à la capacité des êtres et des choses de pouvoir l’accueillir. Il épouse la durée et dépose en chaque seconde la grâce de sa présence. Dieu m’a dévoilée qu’il faut être ce que nous sommes, tel qu’il veut que nous soyons et que son Amour s’avère de toujours à toujours.
Le 13 février 1994, troisième étape, les accompagnateurs et accompagnatrices remettent aux catéchumènes  le « Credo ». Ma vie de future chrétienne se précise. Quel chemin parcouru avec mon accompagnatrice spirituelle ! Le Seigneur est là. Il nous aime ! J’ai découvert que la conversion est un effort concret et quotidien de l’homme, soutenu par la grâce de Dieu, « en vue de perdre sa vie pour le Christ, unique moyen de la gagner ; pour se dépouiller du vieil homme et revêtir l’homme nouveau ». Nous n’entrons pas dans la pleine contemplation du visage du Seigneur par nos seules forces mais en laissant la grâce nous prendre par la main.
Le 5 mars 1994, avant dernière étape, l’Appel Décisif se déroule devant l’évêque dans les Hauts-de-Seine, je suis accompagnée de Jacqueline pour cette célébration. Cette journée était poignante et intense car certains candidats au baptême témoignaient de leur parcours et de l’Amour qu’ils avaient reçu de leur futur Père céleste.
Je comptais les semaines avant de devenir Enfant de Dieu.
Le 19 mars 1994, dernière étape nommée le Scrutin. La communauté chrétienne apporte son soutien aux catéchumènes, une telle force se dégage.
Enfin le 2 avril 1994, je m’engageais à la suite du Christ et je communiais au corps et au sang du Christ à l’église de Saint-Vincent de Paul et mon accompagnatrice spirituelle me faisait grand honneur en acceptant de devenir ma marraine. Lors de ce sacrement, je prenais le nouveau nom de baptême de Marie-Emmanuelle tant empreint de signification. Mon vœu d’appartenir à la grande famille des chrétiens s’avérait exaucé ! Je vivais un bonheur intense proche de l’extase !
Les nouveaux baptisés goûtaient l’instant présent. Quel moment émouvant !

MUSIQUE CELESTE (octobre 2006)


Cette composition musicale céleste interprétée par les anges musiciens et retranscrite sur des phylactères contribue à me revitaliser. Elle m'apporte cette force que Dieu donne aux âmes. Mon violent désir de me retrouver à la droite du Père étant tout amour et incapable de décevoir. La musique se révèle l'art le plus intense, elle nous fait vibrer et nous dévoile à nous-mêmes nos émotions parfois insoupçonnées ou tellement enfouies à l'intérieur de notre être. Ne serait-ce pas le miroir de l’âme ? Les mélodies classiques et religieuses s’avèrent tellement le moyen de louer Dieu devenant une prière intérieure.


Cette adoration me révèle aussi offerte par le jeu des couleurs intenses des vitraux. Lorsque je pénètre dans une église et que l'organiste fait partager au public ses chefs-d’œuvre, les vitraux vivent en laissant échapper une certaine vibration. Elle nous transporte si loin, dans un monde de blancheur et de pianissimo. Est-ce notre imaginaire qui construit cet au-delà ? Pourtant certains êtres ont entrevu l'envers du décor, ce qui est si bien dissimulé aux spectateurs et sans quoi le spectacle n'existerait pas.

ETATS D’AME (2008)

Je suis comme le bateau ivre d’Arthur Rimbaud, se laissant dériver au gré des vagues. Mon âme ne parvient plus à échapper aux tourments. Cette agréable sensation d’extase s’est envolée comme la colombe de la paix. La vie me dévoile à nouveau son indicible tristesse. Le bonheur frisant l’euphorie a laissé place au spleen, merveilleusement dépeint par Charles Baudelaire dans son œuvre d’anthologie, me transperçant et faisant pleurer mon cœur. Dépouillée de mon esprit volontaire, je ne cherche plus à résister à cette nouvelle attaque dépressive. Je languis au tréfonds de mon être, d’atteindre l’au-delà où le temps s’immobilise, la béatitude s’avère perpétuelle enfin le fardeau de la vie réduit à néant.

La désespérance s'est emparée de mon âme s'évanouissant discrètement dans les sables mouvants du désert. La petite flamme intérieure animant mon essence s'est étouffée. L’euphorie s'est métamorphosée en mélancolie douloureuse.


Hâtant l’heure de mon envolée céleste, j’ai renversé la clepsydre du temps s’écoulant doucement jusqu’à la finitude de la vie. L’existence a libéré périodiquement et goutte à goutte son poison dans mon esprit torturé. Ces temps de spleen m’appellent à m’immerger dans les Ave Maria, les Stabat Mater et les Requiem. Ces musiques si poignantes m’hypnotisent et me transcendent. Je me laisse pénétrer par la mélodie, des sensations indicibles m’envahissent et l’extase se révèle en train de naître. Des sonorités chaudes ravissent la demeure.

UN INSTANT DE VIE BRUGEOIS (août 2005)


Par un temps clément, j’ai pu apprécier Bruges en milieu de matinée en savourant un petit café dans un troquet très sympathique se situant en face d’une très belle place. Une certaine atmosphère m’invite à me laisser porter par cette ville inconnue pour moi.


Bruges, très belle ville nous replongeant dans l’ancien temps avec ses rues pavées. Les habitants se déplacent beaucoup en vélo pour aller travailler malgré la dangerosité des dalles. Peut-être est-ce par économie ou tout simplement pour exercer quelques mouvements de gymnastique les aidant à évacuer le trop plein de leur cuisine grasse.


Sur la place du marché passent des calèches faisant visiter la ville aux touristes. Les chevaux connaissent le circuit par cœur et le guide peut laisser aller les rênes. Le pas du cheval retentissant contre les pavés me remémore de bons souvenirs.



Les très jolies maisons fleuries ainsi que les nombreux monuments me dépaysent de mon quotidien parfois lourd à porter. Je retrouve, là, la brique rouge typique du nord.



La visite des canaux est aussi une autre attraction. La foule à l’embarcadère me décourage d’acheter un billet. Ils dégagent une certaine ambiance nous évoquant la Hollande.

Des boutiques de dentelle sont visibles, elles sont presque toutes regroupées dans la même rue. Devant la vitrine d’une d’entre elles on peut contempler une dentellière manier avec dextérité ses bobines. Son adresse la rend très rapide et n’est pas effrayée devant la taille de la pièce à réaliser.

Les spécialités nombreuses ne sont pas très légères. En ce qui concerne les sucreries très favorables pour le régime : chocolat, beignets, caramels durs au beurre salé, des meringues fourrées à la crème Chantilly, etc. Pour le salé : anguilles au vert, bœufs braisés à la bière, endives, frites, etc. Je vous recommande de vous rendre dans le pays pour les déguster.

Les autochtones sont trilingues et cet avantage simplifie bien la vie du touriste.

Ce court voyage m’a effacée ma tristesse récurrente et m’a permis de connaître une période de bonheur tournant presque à l’euphorie.

Je suis prête à retourner dans ce merveilleux pays pour y découvrir les monuments et d’autres coins.


Dessus de fenêtre sculpté du XVIIIème.

Permettez-moi de me présenter (janvier 2011)

Adoptée à la naissance, mais m’avérant d’origine haute-savoyarde, j’ai vécu mes vingt-deux premières années d’existence en Bretagne. Mère biologique que j’ai retrouvée, après maintes péripéties, quarante ans plus tard, situation que connaissent, hélas trop souvent, les nés sous X.
Je poursuis ma dernière année d’études à Périgueux en Dordogne afin de finaliser mon cursus universitaire. En septembre 1983, je m’installe dans la capitale proposant un éventail plus large d’offres d’emploi.
Au cours des années, il m’est loisible de découvrir de nouvelles branches d’activités m’obviant la lassitude d’un travail répétitif.
En mai 1987, je rencontre l’homme qui deviendra mon mari en 1991.
Fin 1993, mon conjoint et moi acquérons une demeure dans un village, abritant 300 gentilés, situé dans l’Oise.
Notre vie s’agrémente d’animaux afin de nous tondre la pelouse.
Mon âme de citadine ressent des difficultés à s’habituer à son nouvel environnement passant la semaine éloignée de son époux (souvent en déplacements pour sa profession). Le temps ne s’égraine pas tel un long fleuve tranquille ! La gestion de la maison conjuguée à la prise en charge des animaux et la marche quotidienne de 3,5 kilomètres ou parfois 7 kilomètres pour me rendre à la gare et rentrer le soir à mon domicile !
 L’accumulation de ces facteurs et le stress de plus en plus intense occasionné par les responsabilités du poste occupé dans l’entreprise ont ébranlé mon état de santé moral.
En 1999, mon médecin me met en arrêt maladie. Les prolongations vont se succéder et trois ans plus tard, la sécurité sociale va me déclarer invalide.
La passion de l’écriture remonte à très longtemps. Encouragée par plusieurs membres de mon entourage, j’ai donc décidé de perpétuer l’exercice en souhaitant apporter des instants de partage à mes futurs lecteurs, ballottée dans les cataclysmes de ma maladie appelée « bipolarité » ou «  maniaco-dépression », dans mes emportements émotionnels qui me conduisent à des excès de tous ordres et plus particulièrement dans des achats compulsifs dont je ne peux pas ignorer le mal. Maladie en partie génétique, provenant d‘un dérèglement de l‘humeur que la médecine ne maîtrise pas encore pour ceux qui subissent ces excès d’euphorie et de tristesse morbide. Je suis en quelque sorte « Seshat qui rit, Seshat qui pleure ». Je souhaite qu’un jour les neurosciences repèreront l’élément déclencheur du virage de l’humeur, c’est un défi immense ! Je souhaite aux générations futures de parvenir un jour à identifier cet élément déclencheur. Quant à la vocation de guérir, elle m’apparait illusoire. En souhaitant que l’Académie trouve l’antidote.